Le chanteur Lluis Llach s’est vu décerné samedi 15 octobre le Prix Méditerranée de littérature par le Centre Méditerranéen de Littérature à Perpignan. L’occasion pour le Catalan, engagé dans la lutte anti-franquiste à ses débuts et aujourd’hui pour l’indépendance de la Catalogne, d’évoquer quelques thèmes, dont celui de l’identité.
« C’est vrai que ici, c’est ma maison » a affirmé Lluis Llach en réponse aux éloges préliminaires énoncés lors de la conférence de presse d’avant remise du prix Méditerranée. “En 1967, 1968, je suis venu ici, j’ai vu des gens admirables qui défendaient leur langue et leur culture. Au temps, du franquisme, il y avait ici une plateforme, un lieu de passage. (…) Je dois remercier le ministre qui m’a chassé (Lluis Llach a du s’exiler en France de 1971 à 1978 à cause de la dictature franquiste. NDLR). J’ai appris grâce à lui beaucoup de choses, de la part d’autres exilés qui continuaient à lutter. On m’a raconté beaucoup de chose, une histoire que l’on ne me racontait pas à l’école. Certains ont espéré qu’après la fin de la seconde guerre, on continuerait à lutter contre le dernier bastion du fascisme en Europe. Cela ne s’est pas passé comme cela. (…) ».
Interrogé sur les motivations qui l’on conduit à écrire le livre « Les yeux fardés » publié par Acte Sud, qui raconte, à travers des personnages du quartier de la Barceloneta, l’histoire de Barcelone avant et pendant le franquisme, Lluis Llach a répondu : « Je n’ai pas eu envie d’écrire un livre. Quand j’ai arrêté de chanter, je voulais juste être un observateur. Le livre est venu d’une demande de scénario que l’on m’avait faite. J’ai vu rapidement que je ne pourrais pas, mais en discutant avec un de mes grands-pères, j’ai appris des choses sur notre histoire familiale. C’est à partir de là que j’ai commencé à écrire. J’ai passé trois ans et demi à écrire ce bouquin dans la joie absolue ».
Sa vision de l’Europe ? « L’Europe aujourd’hui , ce n’est pas ce qu’imaginaient Schuman, Bonnet et les autres. Quand on voit les réfugiés qui traversent la Méditerranée, c’est un coup de couteau dans le cœur. (…) On voit la montée des barbares. Les barbares, arrivent sous la forme de l’ultra-droite, en France, en Hongrie… »
Que pense t-il du nom d’Occitanie ? Lluis Llach sourit : « On vous a volé, hein ? Vous n’existez pas ? On a volé l’identité de… Combien vous êtes ?… 450 000 Catalans (…) Un ministre français disait que s’il autorisait la langue corse, on détruirait l’égalité. Sous Franco, on arrivait à la même décision avec d’autres arguments. Ici, sur les frontons des écoles, il y avait marqué « Soyez propre, parlez français ». Pour que les enfants ne parlent pas catalan. Je pense que les cultures, même les petites cultures, font partie de l’universalisme. L’Universalisme, c’est comme un grand ensemble, fait de multiples composantes. Il faut protéger les langues et les cultures, même les plus petites, comme partie prenante de cet universalisme, sinon il va se désagréger… »
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